Le Finistère du sud au nord - 2021
« Il pleut le matin il pleut le midi,
de Mars à Février la pluie,
le mois de juin y’a des giboulées,
le mois d’août est bien arrosé ! »
C’est avec cet air du conteur Patrick Ewen dans la tête que je donne les premiers coups de pédales vers les Monts d’Arrée, avec femme et enfants à mes cotés… La date de départ ayant été ma responsabilité, si on prend la flotte sur la tête, j’en serai responsable. Autant le dire tout de suite je suis quelque peu tendu au vu des prévisions qui changent toutes les heures, mais après tout la Bretagne est une terre de légendes ! Et on va vite le vérifier…
C’est parti, on quitte la maison à 4 sur 3 vélos. Pour la première fois Solène (6 ans) va pédaler seule sur l’ensemble du trajet. Nous emmenons avec nous un élastique de traction (Shotgun Tow Rope) qui me permettra de la tracter dans les montées trop raides ou trop longues pour ses petites jambes. De la maison direction la gare d’Auray pour attraper un TER en direction de Rosporden ; Départ véritable de notre périple.
Premier rebondissement en arrivant à la gare : Au moment d’acheter nos billets, le préposé à la vente nous annonce qu’il pourra nous vendre les billets passagers, mais pas les billets vélo… D’accord mais on fait comment alors ?
« Vous allez sur internet, et la réservation des billets pour les vélos se fait directement sur le site.
- Ah… Et sur une borne dans la gare, on peut ?
- Non, uniquement sur internet. »
Fin de la première partie. On oublie la pause casse-croûte et on se concentre sur nos téléphones pour trouver comment ça se passe. Après plusieurs essais infructueux, retour au guichet avec ce même charmant monsieur.
« Re-bonjour, est-ce que vous pouvez me montrer comment ça se passe s’il vous plait, je ne trouve pas la solution pour les billets vélo ?
-Non, je ne sais pas non plus, on n’a pas eu de formation, on nous a juste dit que les clients devaient faire leurs réservation sur internet. Allez voir à la borne d’accueil, peut-être qu’ils pourront vous expliquer. »
Fin du deuxième acte, direction l’accueil où visiblement la personne ne savait pas qu’on devait réserver les places vélo… Par chance (ou parce-qu’elle s’ennuyait) une employée nous voit en détresse devant nos téléphones et décide d’essayer à son tour… Elle a eu autant de misère que nous à trouver l’astuce, mais ça y’est ! On a trouver comment faire ! Ah bah oui mais non, pas de places disponibles pour 3 vélos… Prochaines disponibilités : 18 heures… Bref, cette personne s’est débrouillée pour nous faire monter dans le train avec les vélos et sans billets vélos.
Nous voilà enfin sur les rails vers l’ouest !
Descente du train à Rosporden, on vérifie le nombre de sacoches (6, on les a toutes), que les enfants soient bien descendus avec nous sur le quai (2, ça va, c’est assez, ce sont les nôtres) et c’est parti : première rue à gauche et premiers tours de pédales pour cette escapade vacancière ! Ce soir on a prévu de dormir à Scaër, un long faux-plat montant nous emmène jusqu’au camping, au calme (presque personne), et dodo (sous la pluie).
Réveil matinal, nous sommes resté au sec mais la tente est trempée, le soleil tarde à se montrer. On va prendre le temps de faire sécher la tente avant de partir. La prochaine fois on se méfiera d’un truc tout bête, on plantera la tente face au soleil levant, pour que les premiers rayons sèchent la toile (là on ne le sait pas encore mais en fait nous n’allons plus beaucoup voir le soleil…).
Deuxième journée de vélo en direction de Gourin. Là encore c’est un long faux-plat montant qui nous attend. Ça ne parait pas comme ça, mais ça fatigue les jambes les faux-plats, c’est insidieux, tu n’as pas vraiment l’impression de forcer, mais après 15 bornes, tu te retournes et tu te rends compte que tu n’as fait que monter… ça pèse sur les cuisses. Solène pédale sans rechigner (pas encore), et Clément s’amuse à chatouiller maman pour la faire avancer plus vite, à coup de grands éclats de rires ! Rouler sur une voie verte est vraiment plaisant d’autant plus avec des enfants. On se sent en pleine sécurité, on profite du calme de la nature environnante.
L’arrivée à Gourin se fait sans trop de difficulté, étonnement, une montée un peu raide et une longue descente (raide elle aussi) qui nous angoisse déjà pour le lendemain matin. Moralement, on sait qu’on va devoir la remonter, dès demain matin en partant à froid…
Nous avions repéré une pizzeria pour le diner (en haut du village) et bah tant pis ! Ce soir c’est Bolino® et coquillettes/ sauce tomate pour les loupiots !
La pluie ayant refait son apparition cette nuit, la tente est de nouveau très humide (à l’extérieur toujours). Heureusement nous avions retenue la leçon de la veille : toujours s’orienter face à l’est pour que les rayons du soleil sèchent la toile… Alors, ça aurait pu fonctionner, si les nuages gris (foncés) menaçants étaient partis. En l’occurence ils sont restés et on a plié la tente en l’état, ce qui nous a permis d’apprendre encore une chose : une tente mouillée pèse beaucoup plus lourd qu’une tente sèche.
En route pour Carhaix ! La première pensée qui vient quand on parle de Carhaix, c’est son festival, personne ne parle du fait que Carhaix est située à l’entrée des monts d’Arrée ! Et que ça commence à monter pour de vrai ! De là à dire qu’ils ont fait exprès d’installer le camping au fond de la vallée, après une belle descente de 800 mètres… Il n’y a qu’un pas que je ne franchirai pas puisque pour sa défense, ce camping est vraiment sympa. Calme, très agréable, des sentiers de randonnées dans tout les sens, des animaux à observer pour les enfants et une crêperie ! On n’a pas eu notre pizza hier soir, ce soir ce sera galettes et crêpes avant une bonne nuit dans un chalet… Et oui la tente étant très humide on a préféré la laisser sécher à l’air libre avant de se coucher au sec dans une cabane ; La pluie est ( de nouveau) annoncée pour cette nuit…
Au réveil, on prend la mesure de ce qui nous attend, on prépare les polaires et les Kway®, et en route vers les montagnes d’Arrée ! Ce sera certainement la journée la plus humide pluvieuse de notre périple.
Ce qu’il faut comprendre c’est que les Monts d’Arrée, on en rigole avec le point culminant à 380 mètres, mais quand tu dois les grimper en vélo, chargé de tout le barda de camping, tu as l’impression de gravir les Alpes. C’est marrant au début et finalement pied à terre pour tout le monde et on y va en marchant… Et plus personne ne rigole. Ajoutez à ça la pluie qui te fait sentir qu’elle n’est pas loin, une goutte de temps en temps, et qui décide qu’à un moment faut arrêter les conneries et te verse donc des seaux de flottes sur la tête.
Premier réflexe naturel, on appuie plus fort sur les pédales, comme pour essayer de doubler les nuages (sérieux…), deuxième réflexe, enfiler les Kway® et trouver un abris, à la terrasse d’un bistrot. Les enfants trempés et frigorifiés et les kilomètres qui s’arrêtent de défiler. De longues minutes d’attente s’écoulent… et quand la pluie se calme enfin, on ne perd pas de temps, on reprend notre route. D’abord sur le plat… Ensuite sur du pas plat du tout. Pied à terre pour tout le monde et on pousse. A ce moment la seule chose qu’on sait, c’est qu’il reste 7,5 kilomètres d’étape.
« On y est presque les loupiots. Après la montée, ça descend et on est au camping. Courage, on est presque arrivé. »
Ou comment motivé les troupes en pariant sur ton ignorance… Parce-que la montée en question, elle fait 3 km, et qu’après 100 mètres de descente, tu repars pour 2 km de grimpette, rebelote ! Et enfin, délivrance ! Telle un chevalier revenant des croisades, tu aperçois enfin ton lieu de repos bien mérité : Huelgoat ! Son lac, sa foret, ses légendes… et sa fête foraine qui nous vaudra une bonne partie de rigolade en voyant Clément à la pêche à la ligne.
Ce soir, la flemme de cuisiner des bolino®, on a envie de manger confortable, et au chaud, pizzéria ! Et une au reblochon pour papa, après la journée qu’on vient de faire c’est mérité.
Après ce qui aurait pu être une journée démoralisante sous la pluie, finalement c’est avec la motivation à bloc que nous repartons du camping. Pliage de la tente trempée par les averses nocturnes (une nouvelle fois), et on décide de ne pas reprendre la voie verte tout de suite, on va passer par Berrien, pour voir… Et on a vu, comme la veille, 2 kilomètres de montée (oui, à pied) suivi d’une petite descente et d’une autre montée (quand je vous parlais des Alpes tout à l’heure…). Pause casse-croûte. Les enfants ont besoin de se dégourdir les jambes. Et c’est en repartant que ce produit l’inimaginable. Nous avons atteint l’altitude faramineuse de 2700 décimètres ! Et allons jouir maintenant d’une descente de 4 kilomètres faite de longues courbes. O joie, ô douceur, oh ça caille un peu là, on va se couvrir, on est qu’en juillet faut pas abuser non plus. Retour sur la voie verte, nous retrouvons un rythme de pédalage plus régulier et au fur et à mesure que nous voyons les panneaux défiler, une question s’installe dans nos têtes : plutôt que de refaire une nuit au camping comme prévu, est-ce qu’on ne pourrai pas pousser un peu plus et être à Morlaix ce soir ?
En avant, on pousse sur les pédales, on tourne les jambes. Une partie du chemin se fait en montée, et les 10 derniers km se déroulent en légère descente. L’euphorie de l’arrivée nous gagne, on sait que Morlaix est juste devant nous, jusqu’au moment où le viaduc apparait. Comme une haie d’honneur il nous accueille, Solène est émerveillée par la taille de l’ouvrage, et comme un symbole nous passons sous le pont en guise de ligne d’arrivée. Solène, 6 ans vient de pédaler au bas mot 130 km. Tellement fier de notre chouquette, Et Clément qui lui s’est laissé porté dans le siège, à parfois dû trouver le temps long, à certainement subit la météo plus que nous (car immobile), mais a toujours trouvé l’énergie de tirer la langue sur chacune des photos que nous avons prise.
« Bon c’est pas tout ça, mais on dort où ce soir ?
- attends, je regarde, auberge de jeunesse ? ah non tiens, il y a un camping à 3km. »
Ah, ah… Ignorance quand tu nous tiens, ceux qui connaissent Morlaix vous le diront : Morlaix ça monte ! La ville est au fond d’une toute petite vallée, et le camping se trouve… Au sommet, bien sûr ! Et bah on va pousser les vélos, encore une fois, pour la dernière nuit de camping de notre périple. Repas équilibré de rigueur : Bolino®, coquillettes, et saucisson !
Gros dodo, demain on rentre à la maison.
Gare SNCF de Morlaix. On va essayer de ne pas faire la même erreur qu’au premier voyage. Souvenez-vous, le problème de billets pour les vélo…
Allez, on se concentre, réservation sur internet pour les vélos. Ah… soit on imprime (mais pas d’imprimante sur le téléphone), soit on télécharge l’application… Va pour l’application. Ah, maintenant il faut recommencer la manip’ depuis le début. Oh ! sérieux, plus de places disponibles ! Tant pis, on va au guichet, on prend quatre billets, et on monte les vélo en faisant les innocents. (j’ai abrégé un peu, en vrai ça a duré 1h10…)
Et ça marche ! D’autres cyclistes ont fait comme nous, ils ont tout expliqué aux contrôleurs (l’appli qui déconne, les places indisponibles alors que le train est vide ), et quand notre tour fut venu, les billets voyageurs ont suffit. Les contrôleurs plutôt sympa ont même ouvert le poste de conduite aux enfants pour « piloter le train ».
On se rendra compte en arrivant à Auray qu’une journée de train (oui, oui, une journée, nous avons pris trois trains, changements à Landerneau et Quimper) est beaucoup plus fatigante qu’une journée de vélo ; Pour nous mais aussi pour les enfants.
Les 10 derniers km qui nous sépare de la maison seront fait à petite vitesse. Solène est à bout de force, à la limite de s’endormir sur son vélo. Elle aura tout donné pendant 6 jours, et ne s’est jamais plainte. Clément est lui aussi très fatigué. Chacun sera heureux de retrouver son lit et le troupeau de doudous qui l’accompagne, pour une nuit de sommeil profond, bien mérité.